13. L'observatoire national 'Les salariés et leur entreprise 2025' :
Entre enthousiasme professionnel et vigilance accrue sur la santé mentale
Publié par Stéphanie Puigpinos
Le 30 avril 2025
Introduction
La dernière édition de l’Observatoire national des salariés et leur entreprise menée par Lead Opinion, en mars 2025, révèle un panorama contrasté de l’état d’esprit des salariés en France. L’étude a interrogé un panel représentatif de 2000 salariés en poste selon la méthode rigoureuse des quotas (secteur d’activité, région, CSP, genre, tranche d’âge).
Ce baromètre social mis en place à l’échelle nationale confirme une résilience marquée, une dynamique d’engagement mais également des points sensibles notamment sur la santé mentale, la charge de travail et les enjeux liés à la transformation numérique.
Un climat social en entreprise positif malgré les tensions économiques
L’Observatoire révèle une nette tendance positive dans l’état d’esprit des salariés. Parmi une liste citée, 41% se déclarent motivés, en hausse de 5 points par rapport à l’année précédente, tandis que 33% expriment leur optimisme vis-à-vis de leur situation professionnelle (2e citation). Cet enthousiasme ne masque cependant pas la réalité complexe vécue au quotidien par de nombreux salariés, avec une part importante de salariés fatigués / épuisés (près de 1 sur 4), et 21% se sentant stressés/sous pression (+2 pts vs. 2024). Ce stress évoqué, principalement dû à la charge de travail (52%) et à la pression sur les délais (30%), touche davantage les seniors, les cadres et PIS, ou encore les récents embauchés.
En parallèle, près d’un tiers des sondés (33%) souligne que leur travail impacte négativement leur santé mentale, un chiffre alarmant qui atteint même 61% dans le secteur agricole et 48% dans l’enseignement et la formation.
Enfin, 62% des répondants considèrent que le contexte macro-économique et social actuel pèse de plus en plus sur leur quotidien professionnel ( +24 pts vs. 2024). Le secteur du tourisme apparaît particulièrement touché (71%), tout comme celui de la santé humaine et action sociale (66%), avec une sensibilité plus marquée chez les jeunes actifs de 25 à 34 ans (70%).
Flexibilité du travail : un modèle hybride apprécié, avec des pratiques non stabilisées
L’équilibre vie privée/vie professionnelle et la flexibilité accordée recueillent des avis globalement positifs (respectivement 78% et 71%). Toutefois, ces chiffres cachent une réalité contrastée : 39% des salariés ressentent une charge de travail accrue (vs. 7% en baisse), particulièrement marquée chez les professions intermédiaires (67%) et le secteur de la santé-action sociale (46%).
Le télétravail, utilisé par près d’un salarié sur deux (49%), affiche un taux de satisfaction élevé de 92%, pourtant, plus de la moitié des organisations (51%) ont récemment durci leurs conditions d’accès, particulièrement pour les jeunes salariés et dans les structures moyennes (100 à 250 salariés). Ce paradoxe souligne la fragilité d’un modèle hybride encore en pleine stabilisation.
Engagement professionnel fort mais fidélité sous tension
Si la fierté d’appartenance reste élevée (score stable de 82%) et 75% des salariés font confiance à l’avenir de leur entreprise, l’attachement concret à l’organisation (71%, -3 pts) et l’optimisme sur leur avenir professionnel dans l’entreprise actuelle (67%, -3 pts) marquent un léger recul.
Ces signaux traduisent une certaine réserve sur la projection à moyen terme.
Ce que soulève en parallèle l’Employee Net Promoter Score (eNPS), mesuré à -5 au niveau national, présentant un fossé notable entre managers (+4) et non-managers (-14), et se dégradant fortement après 55 ans (-20).
Les principaux leviers d’engagement restent stables, centrés sur l’autonomie (32%), l’ambiance au travail (30%) et l’esprit d’équipe (29%). Toutefois, la rémunération demeure le frein majeur (27%), suivie de la charge de travail (21%) et du manque de reconnaissance (18%). La conséquence directe est que 44% des salariés envisagent un départ à court ou moyen terme, que ce soit pour une réorientation professionnelle, un changement d’employeur, l’entreprenariat ou bien encore une orientation vers le service public.
Management et reconnaissance : des progrès sensibles mais insuffisants
Le management progresse légèrement en qualité perçue (76% de satisfaction), bien que persiste un écart notable hommes-femmes (80% vs. 72%). La relève managériale inquiète également : seuls 35% des non-managers souhaitent devenir managers à moyen ou long terme, une aspiration particulièrement faible dans les grandes structures, révélant une crise potentielle de leadership à venir.
Par ailleurs, la reconnaissance reste une préoccupation majeure : 65% seulement des salariés affirment recevoir des marques de reconnaissance suffisantes, avec des disparités marquées selon les catégories socioprofessionnelles (82% chez les cadres contre seulement 61% chez les ouvriers). Ces écarts renforcent un sentiment d’iniquité susceptible de miner l’engagement sur le long terme.
L’accélération de la transformation numérique et l’impact de l’IA
Autre enseignement majeur de l’étude : la diffusion accélérée de l’intelligence artificielle dans le quotidien professionnel. Plus d’un salarié sur deux (53%) utilise désormais l’IA régulièrement, principalement sous forme générative (74%). Toutefois, l’adoption demeure très clivée socialement, avec un taux de 80% chez les cadres contre seulement 36% chez les ouvriers, soulevant des enjeux majeurs d’équité d’accès à ces outils et à la formation nécessaire.
Perspectives et recommandations opérationnelles
Cette enquête déployée au niveau national sur la Qualité de Vie au Travail (QVT) des salariés en France menée par Lead Opinion souligne plusieurs axes stratégiques clés pour les organisations. Face aux tensions identifiées, des chantiers apparaissent prioritaires :
- Clarifier et communiquer davantage sur la politique salariale et les avantages sociaux
- Rééquilibrer la charge de travail et mieux adapter les effectifs aux réalités opérationnelles
- Renforcer les dispositifs de formation, notamment en lien avec l’usage croissant de l’intelligence artificielle
- Encourager un management inclusif, mieux formé et sensibilisé à la prévention des risques psychosociaux
- Développer une communication interne plus structurée et transparente afin d’améliorer la compréhension et l'adhésion des salariés aux changements organisationnels en cours
Conclusion
Ce baromètre social 2025 dresse ainsi un tableau détaillé et constitue un véritable repère pour les gouvernances d’entreprise, auquel se comparer pour piloter plus efficacement la stratégie RH, renforcer durablement l’engagement des équipes, et anticiper les défis à venir en matière de climat social.
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